Montre prima
Nos coulisses

De la Corse au cadran : voyage au cœur d’une passion horlogère

 8 min

Comment passe-t-on d’un souvenir d’enfance à la création d’une montre qui incarne le savoir-faire horloger suisse et l’ADN de Gemmyo ? Julien Deghetto, Secrétaire Général de la Maison, nous entraîne dans les coulisses d’un projet ambitieux : Prima, la première montre signée Gemmyo. Passionné depuis toujours par l’horlogerie, il a su transformer son obsession pour les mécanismes et l’esthétique en un défi créatif et technique. Enquête sur le parcours, les inspirations et les secrets de fabrication de cet objet d’exception.

Quel est ton premier souvenir horloger ?

Mon premier souvenir horloger remonte à mon enfance. J’étais fasciné par les vieux films, notamment les James Bond, et je garde un souvenir précis de Goldfinger. La montre de Sean Connery m’a marqué, elle représentait pour moi l’accessoire ultime de l’homme. J’ai grandi dans une famille corse qui, bien que modeste, m’a transmis l’importance des belles choses. Nous prenions soin de nos objets, en comprenant le travail qu’ils représentaient. C’est un enseignement que j’ai toujours conservé. Cette vision est d’ailleurs née du cinéma, où la montre, parmi les rares accessoires masculins, se distinguait comme un véritable symbole de raffinement.

Peux-tu te présenter et nous évoquer ton parcours ?

​​J’ai un parcours assez classique, avec une école de commerce à Paris, sans vraiment savoir quelle direction prendre au début. Mon aventure chez Gemmyo a commencé avec un stage aux opérations, où je m’occupais des colis, à une époque où l’équipe comptait une quinzaine de personnes. Ensuite, j’ai travaillé pendant quatre ans au service client. Après une pause de un an et demi, je suis revenu chez Gemmyo, d’abord comme responsable marketing produit, puis me suis spécialisé dans la gestion de projets.

montre Prima
Montre Prima

Comment est né ce projet horloger chez Gemmyo ? 

Le lien avec l’horlogerie est apparu de manière naturelle : étant passionné par ce domaine depuis mon enfance, c’était un projet que j’avais à cœur. Cela faisait longtemps que nous en parlions, notamment avec Pauline, et il était évident que l’horlogerie serait une évolution pour Gemmyo, étant une étape souvent logique pour les Maisons de joaillerie. Les deux métiers sont proches, bien que très différents dans leurs méthodes de travail. Mais, au fond, l’approche de qualité, de savoir-faire et de fabrication reste similaire.

Le défi pour nous a été d’apprendre un métier nouveau : l’horlogerie. Contrairement à notre modèle de travail en flux tendu dans la joaillerie, l’horlogerie nécessite de travailler sur du stock, ce qui était un grand changement pour nous. Pour la montre Prima, notre premier modèle, il a fallu commander des montres à l’avance, une étape inédite pour nous, mais qui nous a poussés à réinventer notre business model.

J’avais déjà quelques connaissances techniques grâce à un stage de montage et démontage de mouvements, mais c’est surtout en travaillant sur le projet que j’ai approfondi mes compétences.

Le modèle Prima est volontairement simple : sans complications ni date, il est pur et efficace. Nous avons choisi de débuter avec un modèle féminin, en cohérence avec l’ADN de la marque, qui est très orientée vers l’univers féminin. La gamme homme est moins développée, mais notre ambition est de rendre la marque de plus en plus unisexe, avec des pièces comme nos alliances, la collection Entaille et les bracelets cordons. Le modèle masculin est définitivement dans nos projets, et ce serait un plaisir pour moi de le développer.

À part le cinéma, d’où vient ta passion pour le monde de l’horlogerie ? Et comment tu la nourris ?

Ma passion pour l’horlogerie vient de loin et va bien au-delà du cinéma. La montre est pour moi un véritable objet de désir, que j’ai toujours vu comme un symbole marquant de moments importants de ma vie. Je suis assez obsessionnel dans mes passions : dès que quelque chose m’accroche, je m’y plonge à fond. Pour moi, la montre n’est pas juste un objet de valeur financière, c’est un objet qui porte des souvenirs et qui accompagne des étapes de vie. Je me suis souvent récompensé de moments significatifs avec une montre : pour la naissance de ma fille, mon mariage, ou même après un triathlon. Mes réussites sont souvent liées à une montre, peu importe sa valeur.

Ma collection personnelle a évolué au fil des ans, de manière réfléchie. Même si j’ai de belles montres, celle que je chéris le plus est une montre ancienne que mon père m’a offerte, un cadeau de ma mère pour leur anniversaire de mariage. Cette montre n’a pas de grande valeur financière, mais son symbole est tellement fort pour moi. Au-delà de l’objet lui-même, c’est l’aspect esthétique et la mécanique qui me fascinent. Avoir un objet aussi petit, aussi complexe, capable de fonctionner toute une vie sans pile, sans alimentation, c’est une prouesse. C’est un véritable symbole de savoir-faire, de conception et de fabrication, et c’est ce que j’admire dans chaque montre.

Pour nourrir cette passion, je suis attentivement l’actualité des Maisons horlogères, je suis les nouveautés et je fréquente des salons comme le Watch & Wonders. J’ai aussi la chance d’avoir des contacts dans ce milieu, ce qui m’aide à rester informé. Je passe aussi beaucoup de temps sur Chrono24, principalement pour observer les nouvelles occasions qui apparaissent, plus par curiosité que par réel besoin. C’est un petit plaisir personnel. Enfin, j’ai un livre de référence absolument magnifique, Watches: A Guide by Hodinkee, publié par Assouline. C’est un véritable graal pour les connaisseurs, et j’adore le parcourir pour nourrir encore un peu plus ma passion.

montre Prima
Montre Prima

Comment l’idée de la montre est née ?

L’idée de la montre est née d’une opportunité business. Avec Pauline, nous avons voulu explorer de nouveaux horizons et proposer de nouveaux produits. Nous avons rapidement identifié une vraie opportunité dans le secteur de la montre femme autour de 1500€, un créneau encore peu exploité à l’époque.

Quant à la façon dont la montre Prima contribue à préserver et perpétuer la tradition horlogère suisse, notre choix de la Suisse s’est fait naturellement. Bien que la France, notamment autour de Besançon, soit un bassin historique de l’horlogerie, nous avons finalement opté pour la Suisse pour la qualité de ses mécanismes. Nous avons d’ailleurs décidé de faire fabriquer nos bracelets à Besançon, dans une tannerie française, mais la partie montre, mécanisme et fabrication, a été confiée à un atelier suisse.

Après avoir rencontré plusieurs manufactures, nous avons trouvé celle qui partageait notre vision et fabriquait de très belles montres. Ils nous ont fait confiance, et cela a marqué le début de deux ans de travail avec eux. Le développement d’une montre est un processus très complexe, avec une phase de conception qui est essentielle. Après le dessin, il faut s’assurer que le mouvement s’intègre parfaitement, que les aiguilles aient le bon poids pour être entraînées, et que chaque élément fonctionne ensemble. Bien que certains de ces critères existent aussi en joaillerie, comme les proportions entre la pierre et le serti, l’horlogerie ajoute un niveau de complexité supplémentaire. Il ne suffit pas de concevoir un beau design, il faut aussi que la montre fonctionne. Cela signifie que nous devons tenir compte des contraintes mécaniques. C’est pourquoi il est crucial d’avoir une manufacture sérieuse qui maîtrise son métier et peut nous guider dès le départ pour que le projet aboutisse.

J’évoque la création de la montre plus en détails dans cet article du Carnet : Les coulisses de la montre Prima

montre Prima
Montre Prima

Quels conseils donnerais-tu pour bien choisir sa montre ?

Pour bien choisir sa montre, il y a plusieurs questions essentielles à se poser : voulez-vous une montre que vous allez porter tous les jours ? Une montre que vous ne souhaitez jamais enlever ? Est-ce qu’elle doit être résistante à l’eau ? Doit-elle être robuste ? En fonction de ces réponses, le choix des matériaux sera important. Par exemple, pour une montre que vous voulez porter quotidiennement, vous pouvez opter pour des bracelets en acier, plus résistants, ou en cuir, une matière vivante qui nécessite un entretien.

Le prix n’est pas forcément un gage de qualité. Certaines montres très chères, bien que de grande qualité, ne sont pas toujours les plus pratiques à porter au quotidien. À l’inverse, certaines montres moins onéreuses, comme les montres japonaises, peuvent être extrêmement durables et parfaites pour un usage quotidien.

Le choix est très personnel, mais je pense que l’aspect esthétique reste le premier critère. Comme pour les bijoux, la beauté du design doit primer. Une fois que vous avez trouvé un modèle qui vous plaît visuellement, vous pouvez ensuite vous intéresser à la qualité des matériaux et au mouvement pour vous assurer que la montre sera durable dans le temps.

C’est ce que nous avons pris en compte dans la création de la montre Prima : offrir un design qui réponde à un besoin esthétique tout en garantissant la meilleure qualité possible en termes de matériaux : un cuir magnifique, un acier de qualité et un mouvement fiable et durable, ce qui la rend parfaite pour le quotidien. Nous avons aussi veillé à ce qu’elle soit étanche à 50 mètres.

Au-delà de la montre en elle-même, il peut aussi y avoir une dimension symbolique importante. L’histoire de la marque peut jouer un rôle important dans le choix : ce qu’elle représente, ses valeurs, et ce qu’elle raconte. En horlogerie, beaucoup de marques ont une histoire technique fascinante : la première montre étanche, la première montre automatique, ou encore la première complication horlogère. Personnellement, c’est un aspect qui me touche beaucoup.

Pour moi, l’un des grands plaisirs d’acheter une montre est de pouvoir la transmettre. Mon rêve est de pouvoir offrir à mes enfants la montre que j’aurai choisie, et cette idée de transmission est vraiment importante à mes yeux.

L’horlogerie, comme la joaillerie, garde-t-elle jalousement ses secrets ou les partage-t-elle entre manufactures ?

L’horlogerie, tout comme la joaillerie, est un milieu très secret, et à mon avis, elle l’est encore un peu plus en raison de la notion de brevets. Dans le monde de l’horlogerie, certaines grandes manufactures créent leurs propres mouvements, appelés « mouvements manufacture ». Cependant, ces manufactures sont assez rares et se comptent sur les doigts de la main. La majorité des marques, notamment les plus petites ou émergentes, n’ont pas leurs propres mouvements. Elles font souvent appel à des mouvements développés par d’autres fabricants, et cela permet de créer des montres avec des exigences de qualité élevées à un prix plus abordable.

Ce qui est fascinant dans l’horlogerie, c’est la diversité des marques, y compris celles qui sont plus accessibles et qui ont des standards très proches de ceux des grandes Maisons. Ces marques peuvent acheter des mouvements auprès de manufactures spécialisées. C’est d’ailleurs le cas de Gemmyo pour notre montre Prima : nous avons choisi un mouvement de qualité, mais nous ne fabriquons pas tout le mécanisme en interne. Nous pourrions développer un mouvement de manufacture, mais cela augmenterait considérablement les coûts et le prix de vente de la montre.

Créer un mouvement de haute qualité nécessite de passer plusieurs examens, comme le fameux examen suisse COSC, qui certifie la précision et la fiabilité du mouvement. Les coûts de développement d’un mouvement, ainsi que les tests nécessaires pour garantir sa durabilité, sont très élevés. C’est pourquoi de nombreuses marques, dont Gemmyo, préfèrent collaborer avec des fabricants de mouvements qui offrent des produits déjà fiables et de qualité. La Suisse et le Japon dominent la fabrication de mouvements de haute qualité, et ensemble, ils développent pratiquement tous les mouvements utilisés dans l’horlogerie moderne.

Question bonus ! Ton portrait multifacette… 

Si j’étais…

Un bijou, je serais la bague Paris 1901 M, pour son éclatante simplicité.

Une montre, je serais la montre Prima, acier et simple tour cuir naturel, un parfait équilibre entre élégance et sobriété.

Une pierre, je serais le diamant chocolat, ma pierre préférée pour son élégance discrète et originale.

Un plat, je serais des cannelloni au brocciu, un clin d’œil à mes origines.

Une œuvre, je serais la montre de Paul Newman, icône absolue de l’horlogerie et symbole d’excellence intemporelle.

Une destination, je serais la Corse, sans hésitation.

Un artiste, je serais Simon Porte Jacquemus, pour son authenticité et sa discrétion malgré son immense succès.

Un mantra, « Je ne voulais pas être là aujourd’hui, c’est pour ça que je suis là. » Une leçon de motivation et de discipline.

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